Voici, un article de la chronique « Au Sanctuaire » de la Revue Notre-Dame-du-Cap publié dans le numéro de mai 2021 écrit par Rémi Lepage, O.M.I.

Qu’est-ce qu’un sanctuaire?

Dans le monde chrétien, nous sommes conscients de l’existence de plusieurs sites religieux : des églises, des chapelles, des cathédrales, des basiliques, etc. Mais qu’est‐ce qui explique qu’un site en vienne à être reconnu comme «sanctuaire»?

Un sanctuaire, c’est un lieu où s’est produit un événement spirituel, voire mystique, que des témoins ont rapporté et qui a été assez marquant pour que des personnes et des groupes s’y rendent en pèlerinage. On donne aussi ce nom à des lieux saints où Jésus a vécu, ou encore à des sites où se trouvent le tombeau ou les reliques d’un saint ou d’une sainte, d’un martyr ou d’une martyre.

LA RÉPONSE DE MARIE

Par exemple, que s’est-­il passé, jadis, au Cap-de­-la­-Madeleine, pour que prenne naissance le Sanctuaire Notre-­Dame­-du­-Cap? On parle de deux prodiges interreliés. Le premier s’est produit à la mi­-mars 1879. Cet hiver­-là, les paroissiens veulent transporter des pierres sur le fleuve afin de construire une nouvelle église, celle qu’ils occupaient étant devenue trop petite. Mais l’hiver est particulièrement doux. Pas de glace sur le fleuve. Les paroissiens décident alors de prier le chapelet chaque dimanche pour que se forme la glace. Il leur faut prier longuement, puisqu’elle ne commence à se former que le soir du 16 mars. Elle en vient enfin à relier les deux rives du fleuve, comme un pont, si bien que du 19 au 25 mars, les pierres peuvent être transportées. Les paroissiens voient dans ce pont de glace la réponse de Marie à leur prière du chapelet. Ils l’appellent le «pont des chapelets ».

Mais un autre prodige a été décisif pour donner lieu à un sanctuaire. Quand la paroisse attendait la formation de la glace, son curé, l’abbé Luc Désilets, avait promis à Marie que si la pierre pouvait être transportée, l’église devenue trop petite lui serait consacrée. Promesse dite, promesse tenue! La consécration est faite le 22 juin 1888 lors d’une messe à laquelle participe le père Frédéric Janssoone. Or le même jour, au début de la soirée, le curé Désilets, le Père Frédéric et M. Pierre Lacroix, un homme handicapé, se rendent à la petite église pour prier. Un phénomène inattendu se produit avec la statue de Marie placée au-­dessus du maître-­autel. Le Père Frédéric décrit l’événement en ces termes : «La statue de la Vierge, qui a les yeux entièrement baissés, avait les yeux grandement ouverts; le regard de la Vierge était fixe; elle regardait devant elle, droit à sa hauteur. L’illusion était difficile: son visage se trouvait en pleine lumière par suite du soleil qui luisait à travers une fenêtre et éclairait parfaitement tout le sanctuaire. Ses yeux étaient noirs, bien formés et en pleine harmonie avec l’ensemble du visage. Le regard de la Vierge était celui d’une personne vivante; il avait une expression de sévérité, mêlée de tristesse. Ce prodige a duré approximativement de cinq à dix minutes. »

SE METTRE EN CHEMIN

Quand un sanctuaire attire notre attention, que ce soit par les événements qui en sont à l’origine ou par les dévotions qui y sont pratiquées, il nous donne le goût de devenir pèlerins, d’aller vers ce lieu où Dieu s’est fait proche par son Fils Jésus, par Marie, ou par l’intercession d’un saint ou d’une sainte, d’un martyr ou d’une martyre. En nous mettant en chemin vers un sanctuaire, nous désirons nous rapprocher de Dieu, voir un lieu qui élève l’âme, offrir nos prières, accomplir un vœu, demander une guérison. Avec les autres pèlerins, nous trouvons des façons parlantes d’exprimer notre prière, par exemple en entonnant un chant populaire, en allumant un lampion, en participant à une procession.

Parfois, nous ne sommes pas touchés d’abord par ce que nous vivons sur le site du sanctuaire, mais par ce qui se passe sur la route ou dans une halte. Notre déplacement fait d’intériorité, de silence, de prière, est propice à des expériences ou à des rencontres inattendues. Dieu aime nous rejoindre en chemin, comme Jésus l’a fait pour les disciples d’Emmaüs.

UNE EXPÉRIENCE DE LA PRÉSENCE DE DIEU

Un sanctuaire nous émerveille devant les expériences de Dieu qu’il a rendues possibles. En allant sur place, nous espérons que Dieu nous fera vivre, à nous aussi, une expérience de sa présence, de son action.

En même temps, il fait bon nous rappeler que nous-­mêmes sommes des sanctuaires que Dieu habite, comme le dit saint Paul: «Ne savez­-vous pas que vous êtes le temple de Dieu, et que l’Esprit de
Dieu habite en vous ? » (1 Corinthiens 3,16). Ainsi, si nous sentons l’appel, à certains moments de nos vies, de nous rendre en pèlerinage vers un sanctuaire, c’est entre autres pour réaliser que Dieu est toujours près de nous, qu’il nous habite, qu’il nous fera vivre mille et une expériences de lui dans notre quotidien. Notre déplacement nous aide aussi à voir que toute notre vie est un pèlerinage, puisque nous cheminons vers le sanctuaire du ciel.

PARTICIPER À L’ANNONCE DE L’ÉVANGILE

En devenant pèlerines et pèlerins, avons-­nous perçu que nous annonçons l’Évangile? Être pèlerin, c’est une manière d’être des personnes que Dieu envoie en mission. Nous mettre en route, nous recueillir, nous émerveiller de ce que Dieu fait, nous exprimer dans la prière populaire, ce sont des façons d’annoncer l’Évangile. Voilà qui rejoint une intention du pape François, lui qui, en 2017, exprimait le souhait que les sanctuaires deviennent plus clairement des lieux d’évangélisation.

À quand notre prochain pèlerinage vers un sanctuaire?