Chers lecteurs,

 Je prends plaisir à partager avec vous une réflexion du Père Normand Provencher, Omi sur les textes bibliques du premier dimanche de carême. Normand Provencher est docteur en Théologie, auteur de plusieurs essais théologiques, fin connaisseur de la réalité de l’Église du Québec et professeur émérite de l’Université St Paul D’Ottawa. Il est un proche collaborateur du Sanctuaire Notre Dame du Cap.

P. Wedner Bérard, Omi
Direction du Sanctuaire NDC

Entrons dans un nouveau monde

Quand le mois du Ramadan commence, les médias publient des reportages sur des musulmans pratiquants qui font preuve de ferveur dans l’observancedu jeûne et de la prière. Ils nous édifient. Et nous, serions-nous en train d’oublier le Carême? Il ne tient qu’à nous de nous engager dans ce temps de montée vers Pâques, à la suite de Jésus.

«J’établis mon alliance avec vous»

Le Carême de cette année s’ouvre par le récit de l’alliance de Dieu avec Noé et ses descendants. Partant de vieux récits babyloniens d’un déluge qui avait englouti la terre, l’auteur de la Genèse les a transformés pour exprimer la foi d’Israël en la bienveillance originelle de Dieu qui fait alliance avec toute l’humanité. Pour la première fois dans la Bible, nous lisons le mot «alliance», un pacte entre Dieu et les humains. À la suite du déluge, Dieu s’engage envers Noé et ses descendants à ce que, désormais, aucun être vivant ne soit détruit par les eaux. À cette alliance universelle, il donne comme «signature» l’arc-en-ciel, phénomène qui accompagne parfois la fin des orages. Il s’agit donc d’un nouveau départ pour l’humanité. Durant ce temps de catastrophe mondiale comme celle la COVID-19, n’allons pas croire que Dieu est en train de punir les humains; au contraire, il veut que tout être vivant soit sauvé.

Victorieux de la tentation

Chaque année, à l’occasion du premier dimanche du Carême, on lit le récit des tentations de Jésus selon l’un des trois évangiles dits synoptiques (Matthieu, Marc et Luc). Cette année, nous lisons le bref récit de Marc. Lors de son baptême par Jean, Jésus reçoit l’Esprit et il est désigné comme le Fils bien-aimé (cf. 1, 9-11). Aussitôt, ce même Esprit l’entraîne au désert où il est tenté par Satan. La Bible donne ce nom à l’adversaire mystérieux qui s’oppose à l’établissement du royaume de Dieu. Marc est le seul évangéliste à ne pas rapporter en quoi consistent les tentations de Jésus. Mais on voit bien qu’il les affronte durant tout son ministère.

Marc conclut son récit des tentations par cette mention plutôt étonnante: «Il vivait parmi les bêtes sauvages, et les anges le servaient.». Cette harmonie de l’homme avec les fauves fait penser à la scène idyllique de l’ère messianique que brosse le prophète Isaïe: «Le loup habitera avec l’agneau… Le veau et le lionceau seront nourris ensemble…» (11, 6). Le service des anges signifie la protection divine. Par ces diverses allusions, l’évangéliste présente Jésus comme celui qui ne succombe pas au mal et qu’il vit en parfaite harmonie avec l’univers. Il peut alors proclamer la Bonne Nouvelle du salut en Galilée, en commençant par un appel pressant à la conversion et à l’accueil de l’Évangile dans la foi.

L’heure du choix

Dieu a promis que le déluge ne se reproduirait plus. Mais des ravages d’un autre type frappent encore notre monde. Et pas uniquement la COVID-19: la société est toujours menacée par l’individualisme, la surconsommation, le mépris des démunis et des étrangers, l’oubli des réalités spirituelles. Profitons du Carême pour nous dépouiller de tout ce qui nous encombre. Devenons libres et attentifs à discerner la présence du Christ qui établit son royaume et qui a fait alliance avec nous lors de notre baptême. En retrouvant le cœur de la foi, les communautés chrétiennes, si modestes soient-elles, deviendront des «arches» de salut dans nos sociétés.

Normand Provencher, Omi.
Collaborateur au Sanctuaire NDC