Voici, un article de la chronique « LA FOI EN QUESTIONS » de la Revue Notre-Dame-du-Cap publié dans le numéro de janvier-février 2023 écrit par Normand Provencher, o.m.i.

Vers une seule Église : Deux poumons, une seule respiration

Chaque année, du 18 au 25 janvier, les Églises célèbrent la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens. Elles prient pour que se réalise l’unité entre les diverses Églises issues de la Réforme protestante au 16 e siècle et l’Église catholique romaine, dirigée par le pape. On ne tient pas tellement compte des Églises orthodoxes, qui remontent au tout début du christianisme.

AU TEMPS D’UNE SEULE ÉGLISE
Durant le premier millénaire de son histoire, il n’y avait qu’une seule Église, mais avec une grande diversité de manières de faire, de langues, de théologies et d’expressions liturgiques. Cette situation n’était pas sans conflits. L’Église de Rome, celle de Pierre et de Paul, était de moins en moins d’accord avec l’Église d’Orient, qui revendiquait son autonomie. Or, en 1054, le légat du pape déposa la bulle d’excommunication du patriarche Cérullaire sur l’autel de Sainte­-Sophie de Constantinople. À partir de cette date, l’Église est divisée officiellement en deux parts qui s’éloignent de plus et en plus : l’une, orientale, revendiquant l’orthodoxie et l’autre, occidentale, se considérant comme la seule catholique.

En plein concile Vatican II, qui a fait la promotion de l’œcuménisme, la levée des excommunications mutuelles a eu lieu lors d’une rencontre entre le pape Paul VI et le patriarche orthodoxe de Constantinople, Athénagoras. L’événement s’est déroulé du 4 au 6 janvier 1964 à Jérusalem, la ville où Jésus a prié afin «que tous soient un» (Jean 17,20). Les accolades et les échanges de cadeaux symboliques entre ces deux chefs d’Église ont beaucoup contribué au dialogue entre l’Église catholique et l’Église orthodoxe. Les successeurs de Paul VI ont tenu à poursuivre la communion entre les diverses Églises et leurs dirigeants.

COMME LE CORPS HUMAIN
Pour promouvoir l’unité des Églises, Jean­-Paul II a souvent employé l’image des deux poumons qui sont nécessaires pour assurer une saine respiration. Dans sa lettre encyclique sur l’engagement œcuménique, Ut unum sint (Qu’ils soient un), publiée le 25 mai 1995, il écrit: « L’Église doit respirer avec ses deux poumons ! » (no 54) Ces deux poumons sont l’Église d’Orient et celle d’Occident. Comme le corps humain, le Corps du Christ (l’Église) a deux poumons, et comme dans le corps humain, ils doivent respirer à l’unisson pour assurer la vie.

La reconnaissance de la primauté du pape est le grand défi de l’œcuménisme. Dans son encyclique, Jean-­Paul II ose demander aux responsables des diverses Églises et aux théologiens de l’aider, en tant qu’évêque de Rome, à exercer son ministère de la primauté pour mieux assurer la communion entre les diverses Églises. « C’est une tâche immense, précise Jean­-Paul II, que nous ne pouvons refuser et que je ne puis mener à bien tout seul » (96). Les réponses à cette invitation ont été jusqu’à maintenant hésitantes et peu nombreuses.

Il ne faut pas s’attendre à ce que les Églises orientales abandonnent leurs traditions. Les Églises ont beaucoup à donner et à recevoir les unes des autres, même l’Église catholique romaine. Plus elles se convertissent au Christ, plus elles « respirent » ensemble. Et la pleine unité ne se réalisera pas dans l’uniformité, encore moins par la domination, mais plutôt dans une profonde compréhension et un partage des diversités légitimes des expressions de la foi chrétienne. D’où la nécessité et l’urgence pour que les Églises se mettent sans tarder à respirer à l’unisson en prenant ensemble les nouveaux chemins de l’évangélisation dans nos sociétés modernes et sécularisées.